Photo : Gilles Bentz

 

45 colonies dans le monde dont 36 dans l’est-Atlantique (12 en Ecosse). La colonie la plus méridionale est la colonie française de l’île Rouzic, sur la réserve naturelle nationale des Sept-Iles, Côtes d’Armor, Bretagne. Apparue en 1939, les comptages sont effectués annuellement depuis 1955 (à cette époque, 550 couples reproducteurs ou Sites Apparemment Occupés : SAO).

Les baisses enregistrées en 2012 et 2013 n’ont pas été notées en 2014. Nous n’avons pas constaté d’intempéries qui auraient pu présenter un risque pour la nidification (lessivage de nids menant à un échec de reproduction) et mener à une sous-estimation de l’effectif reproducteur début juin lors des photographies aériennes.

Avec 21 545 SAO, nous retrouvons des effectifs proches de ceux des années 2009-2010 et la 3ème année la plus importante en termes d’effectifs.

Au cours des 6 dernières saisons, on peut considérer que la colonie de fou de Bassan de Rouzic présente une relative stabilité avec des variations interannuelles liées aux intempéries printanières entre 2010 et 2014. La variation interannuelle d’effectif oscille de – 9% à + 11%. Pour mémoire, l’effectif est de 19526 SAO en 2007, 10391 SAO en 1993, 3000 SAO en 1969 et de 30 SAO en 1939.

La colonie de fou ne connaît plus l’essor qu’elle a connu par le passé et il est difficile de prévoir l’avenir. Tous les voyants ne sont pas au vert :

- la production en jeune des deux dernières années n’est pas très élevée : 0,47 poussin par couple en 2013 et 0.63 en 2014, signifiant qu’environ un couple sur deux produit un jeune. Dans les années 90, la production en jeunes avait été évaluée entre 0,85 et 0,96, conforme aux autres espèces longévives et à maturité sexuelle tardive. Une faible production en jeune peut entrainer, sur le long terme, une baisse du recrutement et un vieillissement de la population préjudiciable à la dynamique de la population.

- le taux de survie des adultes n’est pas connu mais un fait récent pourrait expliquer une mortalité anormale sur une partie de l’aire d’hivernage connue des fous de Bassan des Sept-Iles. En effet, début 2013, les autorités mauritaniennes ont découvert sur un cargo chinois des containers remplis de carcasses d’oiseaux marins (potentiellement des dizaines de milliers), dont une majorité de fous de Bassan. Etiquetés comme poissons, ces oiseaux marins étaient expédiés pour la consommation humaine (Kees Camphuysen, pers. com.).

L’analyse d’autres paramètres étudiés depuis plusieurs années apporteront peut être des explications sur les tendances démographiques et les conditions corporelles des oiseaux nicheurs : longueurs et durée des trajets alimentaires, épaisseur du muscle pectoral des adultes nicheurs, durée des relèves entre partenaires.

Outre Atlantique, la dynamique de la colonie de l’île Bonaventure au Québec se serait effondrée (baisse des effectifs nicheurs et de la production en jeunes) sous l’effet de la surpêche et de la migration vers le nord et en profondeur des proies, conséquence du réchauffement des eaux (G.Magella, comm.pers.). Toujours au Québec, en comparant les données récoltées en 2005 avec celles obtenues entre 2012 et 2014, la distance parcourue pour les voyages alimentaires est plus élevée en moyenne de 200 km. Certains individus ont parcouru 1200 ou même 2000 km durant un seul voyage de pêche. Les adultes perdent du poids et la croissance des poussins semblent mauvaise (G.Magella, comm.pers.).

L’avenir de la colonie des Sept-Iles dépend aussi de l’abondance des ressources halieutiques à proximité.

Nous constatons que l’évolution des stocks de maquereaux, une des principales proies des fous de Bassan après l’orphie, dans les eaux proches de la Bretagne entre les années 1980 et 2000 est parallèle à celle des effectifs de la colonie (Simon Drochon, 2014). Par ailleurs, on suppose que les rejets de l’activité de pêche favorisent aussi la dynamique des populations de fous. Qu’en sera-t-il après l’arrêt des rejets de pêche et quelles seront les dynamiques des ressources proies demain ?

Il est toujours difficile de discriminer les causes exactes amenant une population d’oiseau marin à décroitre ou croître mais des pollutions ou des mortalités anormales pourraient impacter considérablement les effectifs de la colonie de Rouzic qui se stabilisent depuis quelques années. L’île Rouzic non dérangée et exempte de prédateurs présente des conditions de nidification toujours optimale.